lundi 12 septembre 2011

Romain Poite : "Représenter son pays est exceptionnel."

Romain Poite a été élu meilleur arbitre du dernier Tournoi des six nations. Il a également dirigé le jeu lors de la finale de la H Cup. Comme un bonheur ne vient jamais seul, le Tarnais a été sélectionné pour la coupe du monde en Nouvelle-Zélande. 2011 est une année riche pour l’ancien joueur de Graulhet, de Castres et de Cagnac-les-Mines.

Romain, cela vous fait quel effet d'officier lors d'une coupe du monde ?
C’est avant tout une reconnaissance du travail accompli ces dernières années et une reconnaissance de l’arbitrage français, de notre corporation. C’est également le fruit d’un grand investissement familial et personnel. Il ne faut pas oublier que Jérôme Garcès sera aussi présent en Nouvelle-Zélande comme arbitre de touche. C’est important que l’on parte à deux avec Jérôme, que l’on se retrouve là-bas sur des valeurs communes.

Comment s’est fait cette sélection ?
Deux ans avant, nous savions que nous étions jugés sur toutes les compétitions internationales et quelles pouvaient nous apporter du crédit ou pas. C’est une sorte de contrôle continue. Nous avons été supervisés par différentes personnes ces deux dernières années lors des Tournées, du Tournoi et des Tests. Notamment la dernière année où l’IRB avait planifié un groupe d’arbitres qui devaient confirmer. Sur dix arbitres de champ sélectionnés, il y a un seul arbitre français sachant que Jérôme Garcès sera arbitre de touche mais aussi réserviste pour être arbitre central. Nous sommes dans la moyenne internationale. Nous pensons aussi à ceux qui n’ont pas été pris. Mais c’est un juste retour des choses car il y a deux arbitres Sud-africains, deux Irlandais, deux Anglais mais un seul Néo-zélandais, un seul Australien et un seul Gallois (1). Les arbitres français ne sont pas les plus démunis. De plus, Pascal Gaüzère est le quatrième français à intégrer le panel international. On peut dire que l’arbitrage français se porte bien. Le professionnalisme dans l’arbitrage français est très récent mais petit à petit, nous tissons notre toile et nous nous imposons.

« J’ai la chance d’y être mais je pensais être d’abord sélectionné en tant que juge de touche »

Pour vous, arbitrer des matches de coupe du monde, c’est un honneur ?
Oui, c’est un grand honneur mais aussi une reconnaissance pour ceux qui partagent notre quotidien. On parle beaucoup des joueurs, mais représenter notre pays lors d’un évènement comme la coupe du monde est exceptionnel. Nous sommes chanceux au même titre que les joueurs de l’équipe de France. Je vis au jour le jour ma carrière d’arbitre mais c’est vrai que la coupe du monde était un petit point à l’horizon. J’ai la chance d’y être mais je pensais être d’abord sélectionné en tant que juge de touche car ma reconnaissance internationale est très récente. L’année s’est bien passée mais l’objectif était la touche.

Le pays des All Blacks et la coupe du monde, cela représente quoi pour vous ?
La Nouvelle-Zélande est le pays du rugby et possède une véritable culture de ce sport. C’est la discipline majeure de ce pays. Il y a une attente énorme de la part du public et encore plus après le quart de finale et l’échec des All Blacks en 2007. C’est un peu particulier d’aller là-bas, c’est ma première fois en tant qu’arbitre et en la première fois tout court. J’ai arbitré dans l’Hémisphère-sud mais pas en Nouvelle-Zélande. C’est l’occasion de visiter une très belle île et c’est encore plus agréable quand le temps s’y prête.

Regardez-vous les matches du Super 15 ?
Dans l’Hémisphère-sud, ils n’ont pas les mêmes croyances rugbystiques. Parfois, on ne comprend pas tout. Que ce soit eux ou nous, nous voulons tendre vers une uniformité dans le règlement. Les arbitres du Super 15 ont à faire à des joueurs différents et le Top 14 est le plus compliqué des championnats. Mais le Super 15 n’est pas une référence rugbystique, il n’y pas la même notion de combat et de la conquête. Ils sont plus portés sur l’attaque. Ce qui peut expliquer les différences d’arbitrage.

Les Bleus sont-ils bien armés à ce niveau-là ?
Il y a un travail étroit entre Joël Jutge et Marc Lièvremont depuis plusieurs saisons, des études sont faites. Il faut s’adapter à l’individu, cela fait partie des détails qu’il faut maîtriser aujourd’hui dans le monde professionnel. Les joueurs doivent vite s’adapter à l’arbitrage, ils doivent parler de nous entre eux car nous avons nos petits « dadas » comme les autres sportifs. Mais on l’a vu depuis plusieurs années avec le travail de Joël Dumé (Directeur de la direction technique nationale des arbitres) et Joël Jutge (son adjoint), l’équipe de France est très peu pénalisée. Quand les joueurs connaissent bien la règle, tout va bien.

La mêlée est un secteur qui fait débat au niveau international. Ce secteur de jeu va-t-il faire l’objet d’une attention particulière ?
La mêlée appartient aux joueurs de la première ligne. Les arbitres ne peuvent pas faire grand-chose hormis instaurer l’équité sur le positionnement et l’introduction. Les joueurs doivent se responsabiliser car aujourd’hui, les joueurs ont tous le même physique et la même masse musculaire. Il y a tellement de subtilités. Certains appellent cela du métier, nous on appelle ça de la tricherie. Il n’y a plus de domination outrancière pendant les matches internationaux comme avant. Et c’est encore plus dur à juger.

Il y a des équipes que vous redoutez ?
Non pas vraiment. Chaque match apporte son lot de vérité. Ce qui est certain, c’est qu’un match alerte est plus facile à réguler. Quand il y a plus de combat, c’est plus dur.

Quels sont les matches que vous arbitrerez ?
En tant qu’arbitre de champ, j’arbitrerai Samoa-Namibie, Afrique du Sud-Fidji, Nouvelle-Zélande-Canada et Angleterre-Roumanie. Et également trois matches en tant que juge de touche.

Vous êtes dépendant du parcours du XV de France après les matches de poule ?
Nous avons une date butoir. Jusqu’au 4 octobre, nous sommes dans la compétition. Après, une sélection de 6 arbitres de champ se fait. Jusqu’aux quarts de finale, nous ne sommes pas dépendant du parcours de l’équipe de France. Après, l’IRB doit réfléchir, voir si on a arbitré plusieurs fois la même nation, etc. Je souhaite le meilleur parcours possible à l’équipe de France. Je vais en Nouvelle-Zélande sur la pointe des pieds et si l’on peut prolonger l’aventure, ce sera avec grand plaisir.

(1). George Clancy (IRL), Alain Rolland (IRL), Dave Pearson (ANG), Wayne Barnes (ANG), Romain Poite (FR), Bryce Lawrence (NZ), Craig Joubert (AFS), Jonathan Kaplan (AFS), Nigel Owens (GAL), Steve Walsh (AUS).

Propos recueillis par Guillaume Bonnaure.
Photo DR.

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